Guillaume monte en compétence en spéléologie en participant au dernier stage fédéral (Fédération Française de Spéléologie) "Perfectionnement Spéléo" à Saint Pé de Bigorre du 24 février au 2 mars 2024. Voiçi son récit :
"Je pratique la spéléologie depuis deux ans dans le club et j'ai voulu pousser plus loin ma compréhension et ainsi mon apprentissage de la discipline en réalisant un stage SFP2 technique de progression.
En m'inscrivant, je ne savais vraiment pas à quoi m’attendre, mais mon envie d'apprendre était plus forte !
Me voilà donc parti pour une semaine de stage à Saint Pé de Bigorre dans les Hautes-Pyrénées (juste en-dessous de Lourde) en fin février avec de la pluie annoncée toute la semaine, joie...
Durant cette semaine de stage, nous avons eu le privilège d'être logés dans un centre de sports aquatiques disposant d’une salle de séchage : un luxe avec la météo que nous avons du côtoyer...
Dès les premiers instants, les cadres nous ont mis à l'aise en indiquant qu’ils étaient là pour nous faire monter en compétence et non pour nous dispenser un cours. Nous étions cinq stagiaires, pour seulement deux cadres, au lieu d’un cadre pour deux, mais cela ne nous a pas empêché d’apprendre et de pratiquer.
Après la préparation des kits, nous voilà donc partis pour une première sortie à trois stagiaires avec un équipement en double. J'avoue que j'appréhendais la première sortie, la peur de la page blanche, le jugement des autres stagiaires... Mais le cadre a su me faire comprendre que j'étais là pour apprendre et qu'on avait une semaine pour progresser.
A la fin de la cette intense première journée, le cadre m’a demandé de refaire ensemble le lendemain la même cavité, pour m’enlever le poids de la découverte (lecture de cavité). Après une nouvelle soirée d'échanges, riche en partage de savoir, je me sens prêt pour ce deuxième round !
Cette seconde sortie fût une riche ouverture d'esprit, et m'a permis de me concentrer sur l'équipement et toutes les alternatives possibles avec l'environnement pour fluidifier la progression.
Le second soir, on nous a indiqué que la journée à suivre allait être une journée un peu spéciale, ayant pour objectif la découverte des divers métiers possibles dans le milieu souterrain.
Ce n’est que récemment que cette journée est au programme des stages, elle permet d’avoir un autre regard sur la spéléologie, de mieux comprendre l’environnement dans lequel on évolue, les voici :
➢ Géomorphologie : la science qui étudie les formes du relief terrestre, décrit les éléments constitutifs de l'architecture d'un territoire, explique leur genèse et leur évolution dans le temps et l'espace.
➢ Spéléothème : l'examen des spéléothèmes et de la morphologie générale des conduits permet d'échafauder des hypothèses sur la genèse et les évolutions passées de la cavité.
➢ Karstologie : une discipline scientifique à part entière dont l'objet d'étude se concentre sur les phénomènes associés aux terrains calcaires. Inversement, la karstologie appliquée à un massif et à un ensemble de cavités
voisines permettra de mieux comprendre l'histoire et la logique spatiale d'une nouvelle cavité en cours d'exploration sur le même massif, ou au voisinage de cavités précédemment étudiées ou de même nature.
➢ Bio spéléologie : l’étude scientifique de la faune vivant dans les cavités, terrestres ou aquatiques, naturelles comme artificielles. Cette faune est dite «cavernicole ».
Il existe trois types d’organismes :
• Les trogloxènes : Comme leur nom l’indique (troglé : la caverne et xenos : l’étranger) ces organismes sont étrangers aux cavernes, ils ne sont que des hôtes temporaires, ils ne passent donc qu’une partie de leur vie dans les grottes. Par exemple les chauves-souris (cf. rubrique Chauves-souris).
• Les troglophiles : Ces organismes sont « les amis de la grotte ». Bien qu’ils puissent vivre à l’extérieur, ils peuvent aussi passer toute leur vie dans les cavités.
• Les troglobies : Ces organismes sont ceux qui ne vivent que dans le monde souterrain, ce sont les organismes véritablement cavernicoles. Ils ont subi des changements morphologiques qui les empêchent de vivre à l’extérieur.
En effet, les grottes présentent des conditions de vie particulières (pas de lumière, absence de végétaux, température basse, humidité très élevée), ce qui entraîne notamment la perte des yeux ou la dépigmentation de l’enveloppe protectrice de l’animal. Cette dépigmentation est due à l’absence de mélanine, devenue inutile au fonctionnement de l’organisme.
➢ Paléontologie : la Science qui étudie les êtres vivants (animaux, végétaux ou micro-organismes) ayant peuplé la Terre au cours des temps géologiques, en se fondant principalement sur l'interprétation des fossiles.
➢ Anthropologie : une discipline située à l'articulation entre les différentes sciences humaines et naturelles, qui étudie l'être humain et les groupes humains sous tous leurs aspects, dans notre domaine ce seront les traces de vies laissé par l’humain qui seront le plus souvent étudiées (peinture, lieu de vie...)
➢ Topographie spéléologique : la description graphique d'une cavité et des éventuels travaux d'aménagement qui y ont été faits par les hommes qui les ont fréquentées, parmi lesquels les spéléologues modernes. Elle permet de garder une trace écrite et exploitable de la cavité. Sans cela, une cavité ne serait qu'un point sur une carte ou un récit précaire.
Grâce aux mesures faites sous terre, les spéléologues établissent un plan et une coupe qui déterminent les caractéristiques de base de la cavité, en ce qui concerne le développement (longueur) et le dénivelé. Sur ces plans de base peuvent figurer d'autres informations selon la cavité : écoulements d'eau, courants d'air, concrétions, géologie, aménagements anthropiques, etc.
On nous a également présenté le matériel qu'ils utilisent : kit de prélèvement pour le vivant, des échelles de tailles diverses afin de donner un ordre de mesure pour des photos allant de 15cm jusqu'à 1m, papier pour la topographie et même une tablette spécialisée permettant directement d’obtenir la construction de la cavité au fur et à mesure des prises de mesures.
Une fois répartis dans divers groupes pour endosser le temps d'une journée l'un de ces beaux métiers, me voilà le lendemain en direction de la cavité "Castagnet" avec une casquette éphémère de Géomorphologue. Après une entrée de cavité pas vraiment des plus agréables avec de la boue jusqu'aux genoux (et sans oublier avec une marche d'approche sous la pluie comme jusqu'à présent...), nous nous retrouvons dans une cavité horizontale dans laquelle nous nous sommes dispersés pour réaliser nos études. Le soir même, nous avons dû effectuer une présentation de notre journée pour que les autres groupes puissent eux aussi profiter des connaissances acquises.
Le lendemain, nous avons repris le programme, en pratiquant l’équipement de cavité.
Cette fois-ci, nous étions un groupe de deux stagiaires pour un cadre (au lieu d'un pour trois). Ce fut, bien plus agréable car il y a eu nettement moins d'attente et surtout plus de pratique.
Cette fois-ci, nous sommes orientés vers la cavité "Héougacére" qui avait l'originalité d'avoir son entrée enneigée., J’ai pu équiper la première partie, durant laquelle j'ai dû faire attention aux très nombreux frottements. Cela m'a permis de progresser en lecture de cavité, et surtout de savoir anticiper et s'adapter à la mise en place de déviation.
Pour la suite, j'ai laissé le relais à Marie qui a pu équiper une partie plus verticale et comprenant des mains courantes sur des plans inclinés. Nous sommes ensuite arrivés à notre objectif, l'entrée d'un méandre vertical, dans lequel nous avons pu crapahuter sur 50m en opposition avec de l'eau située 10m en-dessous. À la sortie, nous avons pu sortir sans la pluie, une première ! A peine changés et rentrés dans la voiture, le déluge s'est abattu sur toute la route jusqu’au soir.
Les discussions de l'atelier du soir ont augmenté en complexité et se sont terminée en débat sur l'utilisation d'un nœud plutôt qu'un autre. Dernier soir, dernière préparation en vue du dernier jour de sortie, c'est passé si vite !
Je fais de nouveau équipe avec Marie et nous voilà en direction de "Coussau" qui a la spécificité d'avoir une marche d'approche de 50 minutes avec un dénivelé de +600m.
Il ne faut pas oublier d'ajouter le port des kits remplis à ras bord ainsi que des sacs personnels, car dans ce cas de figure il est plus intéressant de se changer devant la cavité pour ne pas rentrer déjà mouillé, en nage sous terre. Par miracle, cette marche fût accompagnée d'un beau soleil, sans vent et surtout avec une vue sur le massif des
Pyrénées qui en faisait presque oublier l'effort.
Cette fois, c'est Marie qui aura eu l'honneur de se creuser la tête en première pour l'équipement. Cette cavité, une fois l'entrée passée, était une faille ouverte entre deux plaques de calcaire noir (typiques de la région). Cela donnait vraiment l'impression d'un voyage au centre de la terre.
Après le partage d'un dernier repas sous terre ; me voilà partis en tête pour équiper.
Ce fut l'un des plus techniques que j'ai pu faire de la semaine, heureusement qu'il est arrivé en dernier. J'ai dû équiper en plan incliné d’une vingtaine de mètres pour arriver devant l'ouverture large d’une dizaine de mètres d'un puits de plus de 35m de profondeur. À cette profondeur, impossible de voir le fond. Les roches dessous nous empêchaient de descendre sans faire de frottement, et il était impossible de mettre une déviation au vu de la largeur de la salle. J'ai dû mettre en place une vire bien tendue (une main courante aérienne) sur plus de 10m pour arriver à un endroit où il était possible de descendre. Ce fut technique, car je devais rester collé, voir plaqué, contre la paroi sur laquelle je progressais tout en réalisant des nœuds au-dessus du vide.
Malheureusement, faute de temps, nous n’avons pas pu descendre ce puits, mais c'est comme ça en spéléologie, il faut savoir renoncer et ne pas se décourager.
De retour au centre et une fois tout le matériel rangé et lavé, nous avons passé une agréable soirée festive tous ensemble avant le départ le lendemain.
Que retenir de cette semaine ? Ce fut une semaine intense, dont l'objectif a été rempli et même largement dépassé. Je ne pensais pas pouvoir progresser autant en un seul stage. Cette expérience m'a aussi permis de me rendre compte qu'il y a mille et une façons d'équiper mais qu'un petit détail peu tout compliquer.
Ce stage a réellement confirmé mon attrait pour la pratique de la spéléologie. J’ai une meilleure vision de tous ces champs de pratique et surtout encore plus envie de continuer à explorer de nouvelles cavités."
Guillaume M.